La corde tendue
Rompre un glaçon
Pour écrire en prose il faut
absolument avoir quelque
chose à dire ; pour écrire
en vers, ce n'est pas
indispensable.
Louise Ackermann
Début d'amour prometteur
Dans la fragilité de la jeunesse
De toute cette ardeur
Qui se libère en douces caresses
Baisers annoncés
Dans le délicieux murmure
D'un échange donné
Brisant le carcan de l'armure
Désirs et rêves dévoilés
Dans la beauté de l'instant
A leurs fronts déposés
La ronde des sentiments
Leurs jeune cœurs en charivari
Battant la folle chamade
Dans cette première escapade
Aux prémisses de leurs envies
Leur laisser le temps de s'apprivoiser
De se couler en cascades
Suivre le cours du temps des baisers
Au soleil de l'été, en sincères tornades.
Dans mes rêves livides de culpabilité,
Je me sens tout ensemble, et captif et geôlier;
Captif de tant de peines et de secrets,
De ces larmes amères que j'ai fait couler,
De tant d'amour perdu et d'inutiles songes...
Geôlier de mes désirs, geôlier insatisfait,
Et geôlier de cet amour et qu'à force je hais...
Prisonnier de moi-même, de moi-même geôlier;
Le geôlier est prisonnier, captif le geôlier
Dans mes rêves livides de culpabilité,
Je me sens tout ensemble , et captif et geôlier...
A ceux que je n'ai pas connus
A celles que j'ai aperçues
Leur dire que j'aurais aimé en un geste
Sur leur front, leurs joues , être.
A l'homme que j'ai trahi parfois
A l'enfant qui m'a sublimée
Aux personnes qui sont un peu de moi,
Vers elles continuer de me pencher.
Apposer mes lèvres sur leurs sourires
Ou leurs grimaces chagrinées,
Etre de leur fleur le secret pistil,
M'énoncer pour mieux les porter.
A la copine de mon enfance
Au petit voleur d'agathes
Aux bonbecs, aux folles récrés,
Dire au présent ce qui fut le passé.
A tous, en fous rire m'éclater
Parce que cela en vaut le coup
Et là, au creux de vos tendres cous
Légère, bouche en rond, vous embrasser.
Plus de combats vains en mon âme,
Se ressourcer à la douce quiétude
Du roulis de l'eau toute calme
Mon cœur soudain en plénitude.
Regarder le ciel étoilé, ne plus penser
A rien d'autre que le bonheur jaillissant.
Sous le manteau de la mer me délester
Du poids des regrets, et du temps.
Aller en figure de proue
Sur le voilier du possible
Enfin changer , en tout,
Et aimer, et naviguer, et Vivre!
Tu fleurais les meilleurs jasmins,
Les roses jalousaient ta joue ;
Avec tes deux petites mains
Tu m'as tout inondé de boue.
Le soleil éclairait mon front,
La lune révélait ta forme ;
Et loin des gloires qui seront
Je tombe dans l'abîme énorme.
Enlace-moi bien de tes bras !
Que nul ne fasse ta statue
Plus près, charmante ! Tu mourras
Car je te tue - et je me tue.
Je le veux tout tiédi du sang sur son corps
Le cri qui subtilement gémit
Sous ma jungle de sentiments,
En perçois-tu le tressaillement?
Un enfant,qui dort encore
Et ne pas savoir qui il est
Un enfant adopté,
Sans chair ni sang liés.
Un enfant en moi porté
Ou dans mon ventre pas relié
Et que la vie me donne
En joie acceptée.
Je veux ce cher enfant
Que je n'ai pas porté
Car il m'est firmament
D'un soir en moi rassuré.
Quand nous irisons
Tous nos horizons
D'émeraudes et de cuivre,
Les gens bien assis
Exempts de soucis
Ne doivent pas nous poursuivre.
On devient très fin,
Mais on meurt de faim,
A jouer de la guitare,
On n'est emporté,
L'hiver ni l'été,
Dans le train d'aucune gare.
Le chemin de fer
Est vraiment trop cher.
Le steamer fendeur de l'onde
Est plus cher encor ;
Il faut beaucoup d'or
Pour aller au bout du monde.
Donc, gens bien assis,
Exempts de soucis,
Méfiez-vous du poète,
Qui peut, ayant faim,
Vous mettre, à la fin,
Quelques balles dans la tête